Rigoletto : Victor Hugo, le drame romantique français et l'opéra.

Les échanges culturels et artistiques entre France et Italie connaissent un tour singulier au XIXe siècle. Alors que l’Italie donnait le ton dans toute l’Europe, notamment dans le domaine de l’opéra, les échanges transalpins trouvent une autre voie d’équilibre pendant l’ère romantique. L’opéra italien, dès les années 1830, développe un intérêt soutenu pour le drame romantique français naissant. Cette langue théâtrale si lyrique, ces coups de théâtre percutants, ces personnages qui sont chacun « une force qui va », bref, ces traits saillants du théâtre de Victor Hugo, d’Alexandre Dumas père et d’Alfred de Musset, deviennent les nouvelles sources d’inspiration de l’opera seria, à côté d’autres valeurs sûres comme Shakespeare, Schiller ou Alfieri. L’aventure théâtrale de Victor Hugo se concentre en une quinzaine d’années, de 1827 à 1843. La majeure partie de cette production est adaptée à l’opéra par les compositeurs et librettistes italiens, pratiquement dans la foulée. Les chercheurs de l’Institut IRPALL interrogeront les raisons de cet attrait des italiens pour l’œuvre dramatique de Victor Hugo. L’adaptation est-elle dans ce cas réalisée sous le sceau de la fidélité aux principes esthétiques largement théorisés par l’écrivain français, en particulier dans la Préface de Cromwell de 1827 ? En embrassant de la sorte le répertoire hugolien, les compositeurs italiens laissent-ils déteindre ces caractéristiques françaises sur leur propre esthétique ? Quels sont les fondements de cette nouvelle francophilie : le souffle de la Révolution française, la libération conquérante des Campagnes d’Italie ou simplement l’audace contagieuse portée par des « enfants du siècle » ?